Après de nombreux films consacrés à la musique et au théâtre, Hugo Santiago revient à la fiction : les spectateurs qui se souviennent d’Invasion, d’ailleurs récemment re-sorti sur les écrans, se réjouiront sans doute de la nouvelle ; ils risquent néanmoins d’être un peu déçus.
Le film pâtit en effet de ses longueurs et d’une construction pour le moins " emberlificotée ". Il s’étire et se ramifie sans cesse, sans parvenir malheureusement à entraîner le spectateur dans tous ses méandres. Le mystère opère peu : le personnage de détective interprété par James Faulkner a beau être attachant (parce qu’il promène avec lui tout un pan du cinéma), il est parfois difficile de s’intéresser à son enquête. La façon dont le film mêle l’intrigue du meurtre et l’énigme qui concerne le passé des personnages est en effet plutôt laborieuse et donne l’impression d’assister à des histoires de famille qui ne nous concernent pas. On regarde tout cela d’un œil détaché, extérieur, en se raccrochant uniquement à l’ambiance de film noir qui ici ou là parvient à transparaître.
En outre, on ressent une impression de maladresse à plusieurs moments dans le film : il y a cette voix-off qui ponctue lourdement le récit, ces plans censément érotiques qui donnent l’impression d’être plaqués, le jeu si maniéré d’Anna Mouglalis, cette séquence insupportable où le détective fait la morale à Maï…
Malgré toutes ces réserves, le film de Hugo Santiago offre de beaux moments, comme des éclats de cinéma au milieu d’un récit sans grand intérêt. Certains cadrages, certains effets de montage, ou encore le jeu de la bande-son rappellent ainsi, comme une évidence, le talent du réalisateur : ce talent, c’est de parvenir parfois à donner à un événement ou un objet anodin un caractère fantastique. Il en est ainsi au début du film, après le meurtre qui lance l’enquête : une simple grille s’ouvre dans un silence soudain absolu, et le spectateur a l’impression de voir un événement extraordinaire.